TdM – Océanie – Australie du Nord

Episode 6 : Australie du Nord

Immenses espaces de Darwin & Alice Spring et Uluru

Pour rappel, la vidéo est disponible en suivant ce lien : https://youtu.be/W6iBLMn5AXo
ou directement ici :

Préambule

Cet article et la vidéo se complètent, l’un donne des clefs de compréhension, l’autre donne à voir et permet, j’espère, de se laisser porter par l’atmosphère.

Synthèse

J’avais un a priori défavorable sur l’Australie et je m’étais posé la question de faire l’impasse sur ce pays.

He bien je me dois de l’écrire, j’ai été séduit par l’Australie et les Australiens.

Le rappel systématique de la place des Aborigènes, le processus d’immigration, le partage des richesses, … m’ont séduit. Comme quoi il faut combattre ses à priori.

Pour cette première publication sur l’Australie, je me cantonne au Territoire du Nord. Immense et très peu peuplé, c’est le bush qui fait peur aux australiens tant il est isolé, inquiétant et exigeant.

De le traverser en bus, plus de 50 heures cumulées de jour et de nuit, m’a procuré des sensations que j’adore. Le nez scotché à la vitre à rêver, discuter, rêvasser, réfléchir, …

Le parc national de Kakadu a enrichi ma collection de peintures rupestres dans un style très différent de ceux rencontrés en Amérique du Sud et en Afrique Australe.

Le fameux Uluru a été le point d’orgue de ce séjour tant il est sacré, majestueux, et imposant.

C’est parti !

@marclegroux

Peuples premiers

Autant en Afrique Australe tous les musées annonçent fièrement que l’Afrique est le berceau de l’humanité, autant, ici en Australie, il n’en n’est fait aucune mention. Comme si c’était une évidence dont il était inutile de parler.

Dans aucun des musées visités, je n’ai vu d’artefacts, de traces de squelettes datés qui valideraient la présence humaine en Australie.

L’hypothèse retenue est que les peuples premiers ont occupé l’Île il y a entre 70 000 et 50 000 ans, donc durant la période glacière. Les spécialistes parlent de préhistoire plutôt que d’histoire car il n’y a pas trace écrite disponible concernant les évènements humains advenus durant cette période. Dans ces périodes, le niveau de la mer était beaucoup plus bas et les accès au Timor et à la Nouvelle Guinée étaient plus faciles.

J’ai constaté une certaine ressemblance physique entre les Papous d’Indonésie et les Aborigènes des Territoires du Nord. Et j’ai lu après coup : « Des preuves génétiques récentes d’Australiens aborigènes et de Papous suggèrent que ces peuples sont issus d’une population ancestrale commune ».

Avant l’invasion / colonisation par les Anglais, débutée vers 1860 (cette date va faire débat chez mes lecteurs), la population a été estimée à environ 700 000 habitants.

Je me suis intéressé aux conditions de vie des Aborigènes aujourd’hui. La vidéo permet d’avoir le son et des images d’illustrations, voilà le texte de la voix-off :

« Comme pour l’Apartheid, je me suis intéressé aux conditions de vie des Aborigènes dans les territoires du Nord où ils représentent environ 8% de la population.

J’ai interviewé 4 personnes, une femme blanche qui a travaillé 7 mois dans une communauté aborigène, un métis rencontré dans le bus, un couple qui vit à Darwin et une femme qui vit à Alice Spring.

Ce que j’ai entendu :

  • Des maisons leur ont été allouées sur les terres de leurs ancêtres
  • Des écoles, des équipes éducatives et de santé sont présentes dans les communautés
  • Leur culture et les rites associés sont très vivaces et sont transmis aux plus jeunes
  • Les Aborigènes reçoivent une aide d’environ 200€ par semaine
  • Sur la longue route entre Darwin la « frontière » avec le sud, à chaque aire de services, j’ai vu de nombreux Aborigènes qui déambulent à toute heure du jour et de la nuit.
  • Il m’a été dit qu’ils y trouvent là une animation qui fait défaut dans leurs communautés.
  • Les non-Aborigènes ressentent de l’insécurité même s’il n’y a pas d’agressivité envers eux.
  • Il partait que des ados font des bêtises, comme celle d’emprunter une voiture pour faire quelques kilomètres.

Je n’ai pas vu de gens saouls ou drogués mais j’ai constaté un très mauvais état de santé général, du désœuvrement et une immense mélancolie. »

Contexte général

L’Australie est un grand pays. Il est difficile de se représenter un territoire de 7 741 200 km2, soit presque le double de celui de la communauté européenne et 14 fois la taille de la France métropolitaine.

La population de l’Australie est d’environ 30 millions d’habitants.

En 2025, l’Australie est un pays riche ! Il est désormais l’un des premiers producteurs de charbon, de fer et d’uranium, trois produits dont la demande explose depuis le début des années 2000. Ce pays dispose d’une des plus grosses réserves de la planète. C’est aussi le cas pour le cadmium, le cobalt, le plomb, certains métaux rares et l’opale. Cette richesse est évidente dès l’arrivée dans le pays, même si Darwin la porte d’entrée que j’ai empruntée est parmi les villes les moins bien loties.

L’indice de gini, pour rappel, « liste des pays par égalité de revenus » est à 34,3 ce qui est très proche de pays comme le Portugal ou l’Espagne, l’indice de la France est meilleur : 30,7. C’est une très bonne performance pour une économie minière, cela signifie que la manne des ressources est, au moins en partie, partagée.

Le « Territoire du Nord » est l’un des dix Territoires de l’Australie. Sa superficie est immense : 1 420 968 km2 presque trois fois la France, pour 245 900 habitants, la densité de 0,17 habitants au km2. Dit autrement, un désert si on compte que Darwin compte environ 150 000 habitants.

Ce territoire est largement plat et très largement couvert du bush, une végétation largement arbustive. Les Road Train y circulent pour ravitailler les communautés et les gros villages et aussi pour le transport des minerais.

J’ai fait le choix de traverser l’Australie du Nord au Sud en bus ou train pour, à la fois prendre conscience des dimensions de cette géographie et aussi pour des raisons écologiques qui font choisir le bus ou le train plutôt que l’avion. Bien m’en a pris, j’ai beaucoup apprécié ces longues heures. Pour rappel, j’avais fait le même type de choix pour la remontée d’Ushuaïa, tout au sud du continent sud-américain, jusqu’à l’équateur géographique au nord de la ville de Quito en Équateur.

Verbatim

Tout au long de ces journées en Australie du nord, plus précisément, dans les Territoires du Nord, j’ai noté des expressions et remarques captées au fil des rencontres :

  • Ici, on ne me sourit plus ! Mince alors, plus d’échange de salutation.
  • Ici, on paye en dollars australien.
  • Ici, en arrivant, ma première bouchée d’un copieux sandwich m’a envahi le palais, cela faisait 45 jours que je n’avais pas mangé de graisse animale. Cela avait beaucoup de goût et était gras.
  • Ici, on ne dit pas (café) Americano mais Large coffee, la référence aux États-Unis déplaît
  • Ici, je ne suis plus différent, je suis blanc, moyennement grand, j’ai un large chapeau sur le crâne et mes couleurs de joues peuvent laisser penser que je suis d’origine Irlandaise.
  • Ici, je peux parler avec tout le monde. Bon il me faut m’habituer à l’accent et à cette fâcheuse habitude de couper les mots. On ne dit pas “Darwin” mais “DA r”
  • Ici, il fait la même température qu’en Indonésie ou au Timor mais le taux d’humidité est largement plus faible, ma chemise n’est pas trempée plusieurs fois par jour.
  • Ici, les moustiques se font rares, ouf !
  • Ici, les prix ont doublé ou même quadruplé par rapport à l’Indonésie (hors Bali). On égale ou dépasse les prix français.
  • Ici, les rues et les commerces, restaurants, guest house, … sont moins propres qu’en Indonésie, il y a moins de main-d’œuvre bon marché pour assurer le ménage.
  • Ici, il y’a peu de piétons, la grosse voiture de type SUV domine. Marcher plus de deux kms est considéré comme une hérésie.
  • Ici, on me dit que la différence entre un wallaby et un kangourou, c’est juste la taille, en fait il y a plus d’une dizaine de « famille » (au sens de la classification) de marsupiaux dont les kangourous, les wallabies, les pétrogales les dendrolagues, les thylogales, et quelques autres espèces.
  • Ici, le matin, c’est déprimant de rouler sur la route, il y a un marsupial mort tous les deux ou trois kilomètres, ils se font majoritairement tués la nuit.

Au fil de la découverte

Darwin

Darwin est une ville d’environ 150 000 habitants, c’est la porte d’entrée Nord de l’Australie. Cette ville n’a pas très bonne réputation et sa population à un fort taux de migration vers le sud de l’Australie. Le contraste avec le Timor est énorme et m’a troublé, je suis arrivé dans une ville moderne où la grosse voiture individuelle est la norme, les avenues sont larges, les immeubles récents et en bon état.

On y parle un anglais particulier notamment dans cette manière de couper la fin des mots. Le hamburger est décliné en de multiples versions, le steak de kangourou est savoureux. Le saloon tel que les films nous les montrent existent mais ne sont plus la norme.

Musée et galerie d’art du Territoire

C’est sans aucun doute la visite la plus riche et intéressante pour moi. Le musée couvre aussi bien la faune que la flore.

Une section est dédiée aux peuples premiers d’une partie du territoire du Nord. Ce sont notamment les Yolnu (ou Yolngu) qui sont mis en avant. Des photos et textes expliquent leur mode de vie et une longue vidéo éclaire sur leur organisation communautaire. J’ai été interpellé par leur slogan :
« Everything on the land and sea is Dhuwa and Virritja and Yolnu people fit into these two moieties » »
qui peut être traduit en :
« Tout ce qui se trouve sur terre et sur mer est Dhuwa (un endroit sacré) et les peuples Yirritja et Yolngu s’intègrent dans ces deux moitiés.»

J’y ai puisé de la documentation et une iconographie qui illustre la séquence de la vidéo sur les « Aborigène Maintenant ».

Mindil Beach

Le chemin côtier qui mène au Musée et galerie d’art du Territoire offre de belles vues sur le golf de Beagie.

Galeries d’art

De nombreuses galeries d’art, essentiellement d’art aborigène, jalonnent la partie commerçante du centre de ville. Le style aborigène est assez facile à reconnaître il est fait d’innombrables points de peintures qui remplissent la toile et forment des motifs abstraits et figuratifs.

Parc National de Kakadu

Le Parc National de Kakadu, au nord-est du Territoire du Nord, est réputé pour sa faune sauvage qui inclut celle des marais, et ses peintures anciennes aborigènes, c’est un site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Il est cogéré par les Aborigènes et la direction des parcs nationaux.

L’aller-retour à partir de Darwin, fait quelques 700 kms.

Le site est habité depuis environ 40 000 ans et la pratique de la chasse et de la pêche sont confirmés par des artefacts.

Le parc abrite une faune très diversifiée de poissons, insectes, reptiles, serpents, et plus de 280 espèces d’oiseaux mais ils sont restés éloignés de nous.

Il a noté que le sous-sol du parc dispose de 10% des réserves mondiales d’uranium.

Comme à la « Cueva de Los Manos » en Argentine ou les « Bush Paintings » en Afrique du sud, les peintures sont exposées en plein air, à la lumière du jour, dans des cavités à l’abri de la pluie et du vent. L’une des spécificités de ce site est qu’il y a quelques peintures qui auraient 40 000 et à quelques encablures, des peintures du millénaire passé, d’autres d’il y a moins de 200 ans et des peintures contemporaines nommés « Rock Art ». Il est bien sûr passionnant de constater les évolutions des symboles.

Ces symboles sont très différents de ceux d’Argentine, très axés sur d’innombrables mains en positif ou négatif, ou ceux d’Afrique du sud, centrés sur des répétitions de scènes de chasse. Je vous laisse découvrir la symbolique locale sur la vidéo.

Le parc inclut de très beaux marais où nous avons circulé en bateau au milieu de mangroves et d’étendues de nénuphars. Nous y avons côtoyé un énorme crocodile qui couvait avec indolence et des « Golden-eye Jabiru » qui ressemblent à des hérons en plus forts.

Le bush

Ha le bush, j’y ai passé de nombreuses heures ! Il est à la fois très monotone et aussi très hypnotisant. Je me rappelle avoir écrit exactement la même expression pour décrire ce nez collé à la vitre du train transsibérien pour regarder défiler la très monotone taïga.

Nous n’y avons croisé quelques wallabies, vu quelques vaches et aperçu des oiseaux.

Les Road Train sont beaucoup plus nombreux. Ils font au maximum 53,5 mètres de long et sont attelés en trois, quatre ou cinq tronçons. Le poids total est limité à 113 tonnes. Les conducteurs des véhicules plus petits doivent prendre en compte que les Road Train ont besoin d’une longue distance pour s’arrêter. De plus, les différents segments du train de remorques ne se suivent pas exactement dans les virages. Je l’ai expérimenté en prenant une vidéo où j’ai constaté que la dernière remorque me collait de près. Cela m’a valu une ferme réprobation de la conductrice du bus.

Des aires de service jalonnent ces très longues routes. En général, elles sont bien achalandées en nourritures chaudes et froides, en boissons diverses, en souvenirs et en toilettes. Elles sont pour certaines ouvertes 24h/24. Elle différent fort largement sur leur agrément, leur propreté et la qualité des produits proposés. Pour des raisons de sécurité, les conducteurs de camions et bus doivent s’arrêter régulièrement, j’ai donc eu le privilège de visiter bon nombre de ces aires de services, y compris sous la voûte céleste (voir vidéo).

Alice Spring

Alice Spring est une petite ville de 30.000 habitants situé au « milieu de nulle part », pour reprendre l’expression anglaise très pratiquée « In the middle of nowhere ». Darwin et Alice Spring sont distants de 21h de bus et 1523 kms à vol d’oiseaux, environ 1650 kms de route.

C’est bien sûr un lieu de ravitaillement pour tous les habitants de ce Territoire du Nord très isolé. De nombreux et vastes commerces constituent le cœur de la ville. Que ce soit de l’alimentation, des bars, des saloons, des matériaux de constructions, des meubles, des drogueries et que sais-je encore. J’ai croisé beaucoup d’Aborigènes.

Il y une petite activité touristique pour la visite de l’Uluru qui n’est qu’à 1.000 kms aller et retour d’Alice Spring. La majorité des touristes arrivent à l’Uluru en avion, mais votre serviteur a décrété que seul le bus était envisageable.

J’y ai visité Anzac Hill, le point culminant de la ville qui permet d’y constater que la ville est toute petite. C’était dimanche et je suis allé à la messe où les rangs étaient particulièrement parsemés. Le « Museum Central Australia » était fermé, j’ai fait une belle rencontre au « Araluen Cultural Precint ». Je suis passé dans un tunnel sonore Aborigène envoutant.

Uluru

L’Uluru aussi appelé « Ayers Rock », est une immense formation rocheuse en grès rouge de 348 mètres située au centre de l’Australie. C’est un lieu éminemment sacré pour les Aborigènes de la région à savoir les Pitjantjatjaras. Le site est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Il est emblématique de l’Australie.

La symbolique du lieu est un pèlerinage, elle est racontée comme suit : « Le rocher est l’un des points du chemin parcouru par les ancêtres au temps du rêve, période de la formation du monde. Ce chemin était emprunté annuellement par diverses tribus afin de perpétuer la mémoire et de stimuler les esprits ». Source centre culturel de Yulara (voir ci-dessus).

De nombreuses peintures rupestres sont réparties tout autour des rochers qui constituent l’Uluru. Les plus anciennes dateraient de 40.000 ans. J’écris « dateraient » car le guide était très flou sur les dates et je n’ai pas trouvé de documentation précise sur le sujet.

Les nuances de couleurs de grès, les différents plis de la roche, les cascades, les piscines, et les lieux les plus sacrés sont très impressionnants et photogéniques. Il est écrit « Les effets de couleur particuliers sont dus à la présence abondante dans la roche de grains de feldspaths qui réfléchissent de façon remarquable la lumière rouge des oxydes de fer ».

Il est planté là au milieu du désert, une petite ville, Yulara, à vocation touristique a été construite pour accueillir les flots de visiteurs qui arrivent, pour la forte majorité en avion.

Jusqu’en 2019 l’ascension était autorisée ce qui n’est plus le cas, c’est une bonne nouvelle notamment pour les Aborigènes.

Le coucher du soleil fait l’objet d’une attention de chacun avec tous les moyens de prise de vue possibles et imaginables. Les selfies sont bien sûr incontournables. L’excursion à la journée que j’avais choisi incluait un barbecue au coucher du soleil, je lui ai fait largement honneur.

La frontière entre le Nord et le Sud

Juste avant la « frontière » entre le Territoire du Nord et le Sud, le chauffeur du bus nous a informé que les végétaux et les plantes étaient interdits de l’autre côté de la « frontière ». Aucun de la dizaine de passagers du bus n’en savait rien. L’amende peut-être de $5.500 Australiens soit environ 3760 €, ça fait très cher la pomme ! Tous les passagers, nous avons partagé les fruits et autres aliments interdits avant de reprendre la route. J’avais connu ce genre de précautions en passant de l’Argentine, qui utilise des OGN, au Chili qui les interdits.

Marc Legroux – Angers – marc.legroux@gmail.com

Autres liens : Chaine YoutubeAbonnement ChaîneFacebook

Merci à Lise Cailleteau pour sa relecture.

Marc @marclegroux.

Autres liens : Chaine YoutubeAbonnement ChaîneFacebook