TdM – Océanie – Timor-Leste

Episode 4 : Timor-Leste

Un pays secret, à découvrir

Pour rappel, la vidéo est disponible en suivant ce lien : https://youtu.be/ZJ2kXsd1lOM
ou directement ici :

Préambule

Cet article et la vidéo se complètent, l’un donne des clefs de compréhension, l’autre donne à voir et permet, j’espère, de se laisser porter par l’atmosphère.

Synthèse

Un article titrait : « Voyage originel au Timor-Leste, l’un des pays les plus secrets du monde », puis j’ai constaté sur une carte que ce pays était situé entre l’Indonésie et l’Australie. C’était décidé, le Timor-Leste était un pays à découvrir.

Ensuite, j’ai lu : « Le Timor-Leste est souvent qualifié de pays le plus pauvre d’Asie », ça m’a rappelé l’Île de Madagascar, comment, pourquoi, quelles perspectives, … ?

J’ai renouvelé cette expérience que j’avais faite au Zimbabwe d’arriver dans le pays sans quasiment rien n’en connaitre, d’être un candide.

Venant de l’Indonésie, le contraste est abyssal ; nombre d’habitants, superficie, niveau de développement, impact du tourisme, langues, infrastructures, …

La capitale Dili est dotée d’infrastructures plus importantes que je ne l’imaginais. Une partie provientt de la période de la colonisation portugaise, notamment les immeubles gouvernementaux. D’autre plus récentes ont été financés par l’argent du pétrole. Par exemple, le plus beau bâtiment récent de 8 étages et flambant neuf et le siège de la société australienne qui exploite le pétrole pour compte du Timor.

La visite du centre du pays, sur la route du Mont Ramelau, met en évidence un décalage dans le temps d’au moins une cinquantaine d’années entre ville et campagne. C’est très frappant.

Pour ceux tenté par un retour dans le passé, l’intérieur du Timor-Leste est à visiter.

C’est parti !

@marclegroux

Peuples premiers

Il y a plus de 5 000 ans l’île de Timor était habitée par des Mélanésiens de l’ethnie Atolis. Puis, il y a 2 500 ans, des Papous et d’autres Mélanésiens, particulièrement les Bélus, se sont installés par vagues successives pendant 2 000 ans. Le territoire du Timor était donc habité par plusieurs ethnies mélanésiennes dont les Atolis (ou Dawans), les Bunaqs, les Famaks, les Bélus, etc., ainsi que des Papous, ce qui contribua à former une diversité ethnique dont on constate encore aujourd’hui les effets.

Alors que l’archipel indonésien s’islamisait, au XIIIe siècle, les Timorais de l’Est sont restés à l’écart des grands bouleversements à la fois religieux et culturels.

L’île était découpée en une soixantaine de petits royaumes qui ont fusionné en deux grands royaumes féodaux. Le premier de 16 royaumes de la province de Servião -actuel Timor occidental – étaient fidèles au Liurai de Sonbai. Le second de 46 royaumes de la province de Belos – correspondant au territoire du Timor-Leste et au royaume d’Atambua – reconnaissaient leur allégeance au liurai de Behale. Tout allait bien dans le pays.

Mais, il y a 500 ans, les Portugais ont envoyé trois vaisseaux pour contrôler le commerce du bois de santal, dont le Timor était un immense gisement, et les épices. Trois ans plus tard, une exploration de l’île a confirmé la grande abondance d’arbres de santal, de miel et d’esclaves. L’implantation de comptoirs puis la colonisation se sont enchainées.

Histoire récente et niveau de développement

Le Timor-Leste, aussi appelé Timor oriental, et, en forme longue « La République Démocratique du Timor Oriental » est située au Sud de l’Asie du Sud-est. Il partage l’Île de Timor avec le Timor Indonésien qui occupe la partie Ouest de l’île.

Son indépendance a été obtenue de longue lutte, en bref :

  • Les portugais avaient colonisé le Timor-Leste, pour rappel, la partie ouest de l’Île était colonisée par l’Indonésie.
  • En 1971, un mouvement politique Timorais se met en place, il manifeste devant le palais du gouverneur.
  • Dans la suite de la révolution des œillets au Portugal 28/11/1975, la politique coloniale portugaise a été rejetée.
  • En 1975, une coalition des forces politiques thimoriennes (le FRETILIN) se met en place et met la pression sur les Portugais.
  • En parallèle, le Timor-occidental (occupé pas les Indonésiens), déclenche des actes d’intimidation et de sabotage qui sont perpétués par l’armée aidée de milices. Le 6/12/1975, l’armée indonésienne déclenche l’invasion du Timor-Leste en entrant dans Dili. L’armée perpétue des actes d’une très grande cruauté, j’ai lu plusieurs fois le mot « génocide ». Selon des statistiques Indonésiennes, entre 1974 et 1978, il y aurait eu 162 778 morts dans les exactions, les sources Timoraises indiquent plus de 300 000 victimes. La stratégie de l’Indonésie était de faire régner la terreur dans la perspective d’annexer complètement l’Île (regroupement des deux parties de l’Île de Timor).
  • En parallèle, le Portugal a formalisé une feuille de route pour la décolonisation du Timor-Leste.
  • Le 22/03/2002, la constitution de la république démocratique du Timor-Leste est adoptée.

Le Timor-Leste est un pays très montagneux, son sommet, le mont Ramelau, culmine à 2 963 mètres, nous y reviendrons puisque j’y suis monté (voir ci-dessous). Le climat y est tropical, donc chaud et particulièrement humide en saison des pluies, ce qui était effectivement le cas en février 2025. La superficie est de 15 410 km2 soit environ le double de la taille de l’île Corse.

La population de 1,5 millions d’habitants vit pour la moitié à la capitale, Dili, qui est le centre névralgique du pays avec son port et son aéroport.

Le Timor oriental est très dépendant des hydrocarbures qui sont exploités par des compagnies Australiennes. Cette manne est la principale source de financement des dépenses publiques. Pour le reste, l’activité agricole prédomine dans un mode très traditionnel de subsistance, quasiment pas mécanisé, et autarcique.

Le Timor oriental est souvent qualifié de « pays le plus pauvre d’Asie », tant en termes de produit national brut global (1,595 milliard de dollars en 2020, selon le FMI) que de PNB par habitant (1 210 $/hab.). Si l’on inclut les hydrocarbures gérés par des compagnies Australiennes, le PNB par habitant du Timor oriental est estimé à 1790 dollars par an en 2022 par le FMI. Il est à noter que le coût de la vie est très élevé, les Timorais disent que c’est à cause de la monnaie, à savoir, le Dollar américain. Le salaire minimum est de $115, soit 10 fois moins que le SMIC en France. La vie à Dili est devenue très chère et beaucoup sont obligés de s’installer dans des villages à 30 ou 50 kilomètres. Il semble que plus de 40% de la population vive en dessous du seuil de pauvreté. Cette situation est en partie liée à la guerre contre l’occupant indonésien qui a ravagé le pays et détruit de nombreuses infrastructures.

L’indice de gini en 2014 était de 28,7% ce qui est très bas et il semble que la situation se soit dégradée depuis.

Il est pratiqué 4 langues au Timor-Leste : deux langues officielles, le tétoum et le portugais, l’indonésien et l’anglais. Le tétoum est largement le plus pratiqué, c’est un mélange de langues malaisienne et de portugais. Le portugais est beaucoup moins pratiqué dans la rue mais l’est plus à l’écrit pour les documents officiels. L’indonésien est pratiqué mais il est à éviter car il rappelle les exactions effroyables de l’Indonésie dans les années qui ont précédé l’indépendance en 2002. Enfin, l’anglais est très peu pratiqué au-delà des personnes en contact avec les ONG et les rares touristes. Les échanges ont été frustrants sauf bien sûr avec les locuteurs de l’anglais comme Velter – guide – et quels autres rencontrés ici ou là.

Comme documenté sur le site du mémorial 39-45, la contribution des Timorais a été très significative pendant la seconde guerre-mondiale, remercions lespour leur engagement dans cette guerre.

Verbatim

Tout au long de ces journées au Timor, j’ai noté des expressions et remarques captées au fil des rencontres :

  • Ici, on ne me sourit plus spontanément voire pas du tout, je m’étais bien habitué à ces sourires.
  • Ici, il y a un héritage portugais et indonésien. Les Timorais ne portent pas dans leur cœur les Indonésiens auteurs d’effroyables exactions (voir les explications historiques). Saluer en langue indonésienne est une mauvaise idée, les massacres sont encore dans les mémoires.
  • Ici, on paye en dollars pour les montants de $1 ou supérieurs et en Centavos en-dessous de $1.
  • Ici, de petits vans – microlet ou mikolet- sillonnent la capitale et la périphérie, le trajet le plus long coûte 25 Centavos. Ils embarquent de grosses enceintes très bruyantes, c’est leur moyen de se signaler auprès de potentiels usagers.
  • Ici, on jette une bouteille d’eau vide par la fenêtre, c’est une incivilité notoire, mais c’est aussi la preuve d’un certain niveau de développement.
  • Ici, il est très difficile de trouver du Wifi et plus encore d’obtenir un débit raisonnable, c’est une école de la patience. Le réseau data-GSM est très souvent muet.
  • Ici, Les habitants sont chrétiens à 85%, c’est l’influence portugaise.
  • Ici, l’eau n’est pas potable et les bonbonnes d’eau sont omniprésentes.
  • Ici, les touristes sont rares, d’autant plus en saison des pluies. Toutefois, j’ai croisé des occidentaux, soit des enseignants de langue portugaise envoyés par leur pays, soit des chargés de missions d’ONG (Organisations Non Gouvernementales) qui béquillent le jeune pays.

Au fil de la découverte

La capitale Dili

Office du tourisme du Timor-Leste

C’était la première porte que je poussais, que voilà une sacrée équipe : une dizaine d’ordinateurs, 2 voire 3 personnes par poste. J’ai été très gentiment accueilli et suis reparti avec quelques prospectus et des contacts pour organiser mon séjour.

Statue du Christ – « Cristo Rei »

Le « Cristo Rei » est une statue du Christ Roi de 27 mètres de hauteur, elle est vigie sur la pointe est de la baie de Dili, au cap Fatucama à environ 8km du centre de Dili. Cette statue qui ressemble fort à celle du « Christ Rédempteur » de Rio de Janeiro (voir la saison 1, épisode 3 « Rio de Janeiro & Buenos Aires). Vue de toute la baie, elle a pour vocation de rappeler à la population de confession chrétienne à 95%, que Dieu les regarde et veille sur eux. Un large escalier jalonné de quatorze stations du chemin de croix permet d’accéder au promontoire. La statue du Christ repose sur un globe terrestre.

Du piédestal, la vue est magnifique sur les immeubles de Dili, sur l’île d’Atauro au loin et sur la magnifique plage de Back Beach. J’y suis monté seul et ai été rejoint pas un premier couple. Le vent soufflait très fort là-haut (environ 100 mètres au-dessus de la mer). On est loin de l’affluence de Rio de Janeiro.

Un jeune couple, intrigué par ma présence, a engagé la conversation, les deux tourtereaux, des universitaires, transpiraient la sympathie et la joie de vivre, ils se destinent à la médecine (voir l’interview).

Les microlet sont fréquents mais la marche est aussi possible, j’ai fait un mixte des deux moyens de déplacement.

Cimetière de Sant Cruz

Ce cimetière est un lieu important de mémoire des exactions, massacres et même, j’ai lu, génocide perpétué par les indonésiens – armée et milices – au Timor-Leste en 1991 pour inciter Timorés à se mettre sous la coupe de l’Indonésie.

Le lieu et la date – Santa Cruz le 12 novembre 1991- rendent hommage à ces victimes tuées en masse. L’Indonésie arrête, condamne, crée des camps d’occupation vers d’autres îles, torture et exécute. Cette mise en place de la terreur avait pour seul objectif de provoquer l’exode des populations vers le Timor occidental, qui est une des provinces de l’Indonésie.

Le rapprochement avec des guerres actuelles (2025) n’est malheureusement par fortuit.

Musée : Centro Nacional Chega

Situé au sud de la ville, c’est le mémorial qui complète le cimetière. Il apporte notamment beaucoup de témoignages de prisonniers qui décrivent des conditions de détention particulièrement inhumaines.

De courts textes très poignants remueraient les plus endurcis. Comme en Afrique du Sud pendant l’apartheid, les prisonniers politiques ce sont beaucoup soutenus entre eux car ils étaient animés d’une vision politique, celle d’obtenir leur indépendance.

La cathédrale

C’est un bel édifice récent, de forme triangulaire, à la décoration sobre, rehaussée de belles boiseries et d’un chemin de croix finement ciselé.

J’ai assisté à la messe dominicale, environ une heure trente minutes. La ferveur est là mais il manque l’ambiance joyeuse de la cathédrale de Nairobi au Kenya. La messe est dite en langue tétoum et une partie est transcrite sur des écrans de télé ce qui me permet de grappiller quelques bribes quand l’analogie avec l’espagnol le permet.

Je suis le seul Blanc de l’assistance et sans doute celui de plus grande taille.

Musée : Timorés résistance archive & Muséum – AMRT

C’est dans doute le plus beau musée de Dili et du Timor-Leste. Il documente l’histoire des cinq cents dernières années du pays avec des lignes de temps chronologiques, des textes en trois langues, des images et artefacts.

Un zoom particulier détaille les étapes de l’obtention de l’indépendance et la mise en place des différentes structures de gestion de la « République démocratique du Timor oriental ».

Mont Ramelau et Mémorial

Le mont Ramelau, ou mont Tatamailauou, ou Foho Tatamailau en langue tétoum, est la plus haute montagne de l’île de Timor, il culmine à 2 963 m. La montagne se situe approximativement à 70 km au sud de la capitale Dili mais à 4 heures de Pick-up tout terrain pour arriver au porche d’entrée du parc national.

Whatsapp a chauffé pour trouver l’agence qui me semblait offrir le meilleur rapport approche rustique / connaissance de la montagne / souplesse / prix.

L’excursion s’est faite en deux jours. Le premier jour, Vilter est passé me prendre en milieu de journée et nous avons fait connaissance. D’emblée nos anglais respectifs nous ont permis de bien communiquer. En route, nous nous sommes arrêtés au mémorial de la contribution des Timorais et Australiens à la guerre 39-45 pour repousser les Japonais. Cette halte a été très instructive. J’en profite pour remercier tous les Timorais Timoraises ont lutté pour une cause bien kafkaïenne et lointaine pour eux. Puis nous avons visité le village d’Hatabuilico, avons rejoint la maison d’hôte « Ovalido Garden » où nous avons pris le dîner local puis dormi.

Nous nous sommes levés à quatre heure du matin pour, rapidement, rejoindre en voiture le porche de départ de l’ascension. La montée dure entre deux et quatre heures en fonction de la condition physique des marcheurs. Nous avons mis moins de deux heures avec Vilter. Nous étions forts joyeux de précéder le soleil de quelques minutes pour arriver au sommet. La vue y est circulaire puisque nous sommes au sommet de l’ensemble du Timor. Nous y avons vu les océans des deux côtés. La descente a été rapide, le retour en voiture bien long.

Quelques notes de la Vidéo du mémorial

La guerre 39-45 a été une guerre mondiale pendant laquelle le Japon, a essayé d’envahir le Timor. Les Australiens et le Timorais ont lutté ensemble pour repousser l’ennemi. Les Australiens ont apportés leur organisation, leurs armes, les Timorais, leur connaissance de l’environnement et des conditions de survie dans la jungle et les montagnes. Les Australiens ont particulièrement souffert de l’isolement et des conditions de vie dans une humidité omniprésente.

Île Atauro

A cette Île sont associés des mots comme ; splendeur, paradisiaque, nature préservée, coraux, vivier de milles espèces, … Le jour où je devais la visiter, le bateau a été annulé à cause du vent et de la force des vagues, dommage.

Merci à Lise Cailleteau pour sa relecture.

Marc @marclegroux.

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